Tu ne regretteras pas, je te le promets. [PV Pandora]

Perdue, je suis totalement perdue. Je n'ai jamais mis les pieds dans un bal, du moins pas à ma connaissance, et avant mes premiers souvenirs, je me doute que j'étais alors trop jeune pour même y songer, et de ce fait, je ne sais pas comment ça va se passer, ni même si ma tenue convient à ce genre de soirée. Pourtant, j'étais... Flattée d'y avoir été invitée. Peut-être même contente, qui sait ?

Et c'est donc sous les yeux de Démence -qui s'avère très amusée de me voir ainsi-, que je cours pratiquement dans toute ma chambre et la salle de bain pour espérer mettre la main sur mon collier, râlant contre ceci ou cela, grognant contre divers obstacles sur ma route. De ce fait, ma chaise de bureau est presque envoyée valdinguer à travers la pièce et mon lit, s'il avait été plus léger, par la fenêtre. Mais je m'en abstiens bien, d'autant plus que je n'ai pas le temps pour cela. Finalement, déçue, je retourne dans la salle de bain pour troquer mon simple linge contre la robe en satin noir que j'avais décidé de porter. Elle est vraiment belle, relativement simple, mais belle. Retenue par une unique bretelle, sur l'épaule gauche, le haut semble serré tandis que le fond, la taille passée, s'élargit en une longue jupe plutôt ample. La taille est cerclée d'une espèce de ceinture en strass, cousue sur la robe, et cette idée se répercute sur la bretelle qui est elle-aussi en perles, et sur les escarpins qui arborent le même genre de couleur, d'un gris un peu argenté. Le tissu satiné offre un contraste saisissant avec ma peau pâle, mais mes cheveux de jais brisent l'effet trop déplacé que cela aurait pu avoir, et le rendu est pas mal. Du moins, dans mes songes, car mes cheveux sont encore trempés, mes pieds nus et ma robe mal ajustée. Enfin, qu'importe.

J'entreprends alors de me sécher les cheveux -tâche rude mais nécessaire-, avant de finalement les coiffer -quand je parle de rude...-. J'imagine que mes mèches rebelles ne sont pas les plus difficiles à dompter, pourtant je peine à les ramener en arrière pour nouer celles du dessus derrière mon crâne et laisser le fond totalement libre. L'une des mèches étant beaucoup trop têtue pour se mêler aux autres, je la laisse finalement libre, formant une petite spirale sur le côté droit de mon front, mais quand j'observe le résultat dans le miroir, je suis satisfaite. Je n'espérais pas un rendu comme celui que j'ai obtenu, et cela ne me déplaît pas.

L'heure tourne, et pourtant, j'ai toujours de l'avance ; beaucoup trop sûrement. Mais qu'importe, j'ai l'habitude de prévoir trop de temps pour ne jamais tenter le diable et pouvoir déjouer les plans d'un quelconque imprévu. Enfin bref, j'aurai ainsi tout le temps de retrouver mon pendentif... J'ajuste donc ma robe, vérifie que je n'ai rien oublié, les chaussures mises à part, et finalement je me remets en quête du collier, retournant -presque littéralement- ma chambre. Finalement, découragée, je m'assieds sur mon lit sur lequel Démence est couchée en boule, et pose ma main entre ses oreilles, soupirant. Elle ouvre ses paupières, lève ses yeux rouge sang sur moi sans pour autant relever la tête, et m'observe quelques instants, sans bouger. Et finalement, après de longues secondes, elle se lève, saute au bas du lit et se dirige d'un petit trot vers mon bureau. Elle ouvre un tiroir avec ses dents, au prix de quelques efforts, y fourre le museau puis finalement en ressort avec une chaînette argentée entre les crocs, au bout de laquelle pend une pierre violette sombre, comme mes yeux, arborant la forme d'une goutte. Mon regard s'illumine en reconnaissant le collier, et la louve revient vers moi sans cacher son amusement, agitant sa queue de gauche à droite se moquant gentiment de moi. Je la gratifie d'une caresse avant de prendre le bijou et de l'accrocher autour de mon cou, remerciant mon amie avec un petit rire. Je me souviens l'avoir rangé dans ce tiroir quelques jours plus tôt, en disant à Démence qu'ainsi, le jour venu, je saurai où le trouver... Raté ! Heureusement que cette boule de poils est là pour me le rappeler !

Je balaie ma chambre du regard, embrasant chaque recoin avec attention. Ma veste de cuir est posée sur ma chaise, mais elle déteindrait trop avec ma tenue, d'autant plus qu'elle est plus ou moins usée et vieille, mais surtout banale. Et puis, il ne fait pas froid, et même, j'ai l'habitude : j'ai passé plusieurs années en cavale, et chaque nuit n'était pas passée sous un toit, et encore moins au chaud ! En principe je me contentais du flanc de Démence pour me reposer... Et puis, le bal se tient en salle, pas dehors, j'imagine donc qu'il ne fera pas froid. J'abandonne donc l'idée de prendre ma veste, enfile mes escarpins, puis commence la longue attente précédant l'arrivée de Dylan. Et elle ne se fait pas sans inquiétude et appréhension, car je redoute cette soirée autant que je m'en impatiente. Et puis, j'ignore ce que cela donnera... J'ignore même si j'ai bien fait d'accepter d'y aller, j'ai sûrement fait une erreur... Qu'ai-je fait ? Dans quoi me suis-je encore fourrée ? Je vais finir par croire que j'adore me fourrer dans les pires endroits et situations tête la première... Mais après tout, pourquoi ne serait-ce pas le cas ? Peut-être que je ne m'en rends simplement pas compte ?

Un bruit me tire de mes pensées, et je sursaute, réveillant au passage Démence qui s'était assoupi. Il me faut quelques secondes pour réaliser que ce bruit est celui d'un frappement à la porte, et quand je m'en rends compte, mon cœur semble s'arrêter. Voilà l'heure fatidique... Voilà peut-être le début de la pire soirée de ma vie. Ou pas... Je me lève, imitée par Démence qui se précipite sur la porte, et se dresse sur ses pattes arrière pour tenter de l'ouvrir, s'appuyant contre le battant de ses antérieures. Je la repousse gentiment mais fermement et attrape la poignée. Mais à ce moment-là, j'hésite. Fixant le bois de la porte, je prends une grand inspiration, baisse la poignée et l'ouvre d'un geste plus mécanique que volontaire.

Je découvre alors Dylan dans toute son élégante grandeur. Sa chemise blanche laisse entrevoir sa musculature, deux malheureux boutons oubliés, celui du col et le suivant. Sa cravate bleu clair desserrée rappelle ses yeux, tout comme mon collier les miens. Cela me fait sourire ; apparemment je n'ai pas des goûts trop déplacés. Les mots viennent à manquer tandis que Démence se faufile dans le couloir, s'arrêtant à moitié sur le seuil pour lever ses yeux rouge sur le jeune homme. Elle semble le mettre en garde, le prévenir de veiller sur moi ou elle risque de se charger de lui. Son pelage blanc grisâtre est légèrement hérissé, juste ce qu'il faut pour lui montrer qu'elle n'apprécie pas son idée. Et moi, je reste totalement immobile, sans voix, cherchant vainement mes mots.